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Les États généraux du film documentaire 2022 Expériences du regard

Expériences du regard


Nous sommes très heureux de vous présenter notre quatrième et dernière sélection « Expériences du regard ». Un autre duo prendra le relais l’an prochain. Expériences du regard : la formule se donne pour simple. Terriblement simple pourrait-on dire, tant nombre d'entre les dix-sept films que nous présentons cette année sont des objets à même de nous nouer la gorge.

Expérience. Il faudrait laisser résonner longtemps le terme. Sur une page blanche. Sur un écran. Et imaginer un personnage, lequel serait demeuré invisible si un auteur n’avait décidé de le représenter, de le mettre en scène. Une rencontre a eu lieu, un personnage documentaire a surgi. « Personnage documentaire ». L’expression consacrée est étrange, paradoxale, contradictoire. Elle exprime une tension qui agit aux fondements mêmes des pratiques cinématographiques que nous défendons.
Des personnages de cinéma documentaire, cette édition en regorge. Celui-là, modeste, invisible, c’est Sami en ses odyssées[1]. Rarement comme face à ce film, nous avons éprouvé si vivement combien l’art et les mythes peuvent éclairer un être de l’intérieur. Au prix de l’exclusion, du dénuement. Un être fêlé, bienheureux pourtant car il laisse passer la lumière... Celle-ci, c’est Chance[2]. Une gamine, un prénom, un destin. Le sourire d’une enfant. La brutalité d’une adulte.

Intrinsèquement liés au regard, doute et questionnement mènent les auteurs à transgresser les lieux communs. Ce processus ne va pas de soi. Des questions brûlantes s’exprimeront au cours de cette semaine de projections. Des films qui nous coûtent, nous éprouvent et finissent par nous hanter. Car il en est qui, forts d’un regard unique sur une situation, un lieu, des personnages, parviennent à troubler nos repères. Ils nous poussent à porter un œil neuf sur ce qu’on ne regarde plus - à force de trop le voir. Ils parviennent à nous mettre en capacité de voir ce qu’on ne veut pas voir, plus ou moins consciemment. Ici, Auschwitz, musée symbole d’un génocide, mais aussi épicentre trivial où s'entassent des hordes de touristes[3]… Là, le parc d’un asile pour personnes lourdement handicapées, territoire occulte rendu visible par le travail du son. Denis Cointe, réalisateur de Barail[4] dit de son film qu’il est « une invitation à traverser l’image... de la normalité ».

Au fil de ce travail de programmation, nous avons développé un certain nombre de credo. Des repères que nous avons trouvés empiriquement et qui nous ont permis d’avancer dans la sélection de films. Nous avons laissé vibrer en nous l’émotion et le sensible. Des affects qui, souvent, trouvent leur source dans le dépassement, voire la sublimation des enjeux de départ. Émotions qui découlent d’une prise de risque... Car un film ne saurait se limiter à une idée ou un programme. Il se doit de nous faire sortir de notre confort. Ces films-là sont rares. Nous espérons que vous trouverez, dans ces œuvres, le feu intense que nous y avons vu.

Bon festival et à bientôt à Lussas !

Stéphane Bonnefoi et Adrien Faucheux

1. Les Odyssées de Sami, Robin Dimet, 68'
2. I am Chance, Marc-Henri Wajnberg, 85'
3. Museum, Yonathan Levy, 73'
4. Barail, Denis Cointe, 52'

Débats animés par Adrien Faucheux et Stéphane Bonnefoi, en présence des réalisateurs et réalisatrices et/ou des producteurs et productrices.